CHARTRES
Louis Philippe, duc DE CHARTRES
Lieutenant général et roi des Français
(Paris 6.10.1773 -
Claremont (Angleterre) 26.8.1850)
Fils
aîné de Louis-Philippe duc d’Orléans dit
Philippe-Égalité, guillotiné le 6 novembre 1793,
et de Louise
Marie Adelaïde, née de Bourbon-Penthièvre,
Louis-Philippe est
colonel d’un régiment d’infanterie et d’un régiment de
dragons
du nom de Chartres en 1785.
Il sert à l’armée du Nord,
sous Biron en 1792. Maréchal de camp le 7 mai 1792, il est nommé
lieutenant général le 11 septembre 1792
et est affecté à l’armée
du Centre sous Kellermann. Il sert à Valmy, à Jemmapes le 6
novembre 1792,
à Maastricht en décembre 1792 où il admire les travaux
de siège de Marescot. Dans ses mémoires il cite :
« Les travaux furent
dirigés avec tant de jugement et de célérité que le feu de la place
ne
nous fit perdre que peu d'hommes. »
Il est encore à Neerwinden le 18
mars 1793. Décrété
d’arrestation le 2 avril 1793, il accompagne Dumouriez
dans sa
fuite vers le camp des Autrichiens, le 5 avril 1793.
Le 25 novembre
1809, il épouse à Palerme Marie-Amélie, fille de Ferdinand IV, roi
de Sicile,
qui lui donne dix enfants.
Colonel général des hussards
en mai 1814, Louis-Philippe est proclamé Louis-Philippe Ier
roi des Français le 6 août 1830.
Il règne jusqu’au 24 février
1848, jour où il abdique.
Il se réfugie en Angleterre au château
de Claremont
et est enterré à Dreux depuis 1876.
Il publie Mon
Journal sur
les évènements de mars 1815 (1849).
Le nom CHARTES est inscrit sur
l'Arc de Triomphe en 1841
sur le pilier nord en haut de la colonne 01.
Le duc de
Chartres est représenté sur l’Arc de Triomphe dans le haut-relief
de Jemmapes,
face à l’avenue Kléber.
Il figure aussi parmi les 39
personnages identifiés, sculptés dans la frise de 137 m
autour de
l’Arc de Triomphe.

Louis-Philippe à dix-neuf ans en tenue de lieutenant général de la Révolution,
au moment de Valmy et de Jemmapes.
Portrait peint de manière rétrospective par Léon Cogniet en 1834.

Portrait présumé du duc de Chartres,
extrait de Journal de mon Voyage d'Amérique en 1796
Où figure le duc de Chartres sur le haut-relief de Jemmapes ?
Arc
de Triomphe : La bataille de Jemmapes par Charles Marochetti (1805 -
1868)
relief supérieur latéral sud, côté avenue Kléber, 1834.
Le
personnage central à cheval brandissant son chapeau est le lieutenant
général Dumouriez
(nom inscrit en colonne 03).
Le personnage blessé à gauche est le maréchal de
camp François Richer Drouet
(Rouen 16-1-1733 - Le Quesnoy 16-11-1792)
qui
meurt des suites de sa blessure à la jambe.
Il était sous les ordres du
duc de Chartres, dit lieutenant général Égalité.
Les différentes interprétations selon les auteurs
■ D'après
la lettre que le roi Louis-Philippe adresse de Neuilly à Thiers, probablement en
1834
Louis-Philippe pense être représenté dans le personnage en
uniforme de hussard,
à droite de Drouet blessé :
«
De peur de l'oublier, je vous rappelle que dans le bas-relief de l'Arc
de Triomphe de l'Etoile,
je me trouve bien représenté au milieu des
généraux de 1792, ce qui est une place
que je réclamerais avec bon
droit, puisque j'ai été promu au grade de
lieutenant génétral le 11
septembre de cette année et que j'ai commandé
le 20 septembre à Valmy
la seconde ligne de l'armée et l'aile droite à Jemmapes
le 6 novembre,
mais on m'y fait porter l'uniforme de hussards
que je n'avais jamais
porté avant la Restauration, tandis que je réclame
celui de lieutenant
général pour le bas-relief.
Si le sculpteur vient aux Tuileries, mon
valet de chambre lui montrera l'habit identique
que je portais à
Jemmapes, que j'ai conservé soigneusement,
mais que je ne prête pas
parce que j'y tiens beaucoup.
Horace Vernet l'a dessiné quand il a fait
mes batailles.
J'ai eu beaucoup de peine à le conserver au milieu
des vicissitudes de ma vie aventureuse.
Mais enfin il est encore chez
moi et en très bon état.
Bonsoir mon cher ministre ; je le ferai
apporter demain dans mon cabinet. »
(Duc de Castries : Monsieur Thiers,
Librairie Académique Perrin, 1983, pages 101 et 102)
■ La
Notice historique de l'Arc de Triomphe de l'Étoile de J. Thierry et G.
Coulon,
Paris, 1838, indique pour cette représentation de la bataille
de Jemmapes que le duc de Chartres
fait partie des généraux qui suivent
Dumouriez, sans préciser lequel :
« Le bas-relief de la face latérale de gauche, par M. Marochetti,
représente
la bataille de Jemmapes (6 novembre 1792). Dumouriez,
général en chef,
suivi de son état-major, des maréchaux de camp
Ferrand, Sténebosse, Rosières, Bloisières, etc.,
anime l'ardeur de ses
troupes arrêtées un instant par les obstacles qu'oppose
la forte
position des Autrichiens. A gauche le colonel Thouvenot s'élance pour
attaquer
le flanc droit de l'ennemi. Le général Drouet a la jambe
cassée d'un coup de feu,
et reçoit les secours d'un officier
d'ambulance. Parmi les généraux qui s'avancent
avec Dumouriez, on
remarque M. le duc de Chartres, à qui Dumouriez
confia le commandement
du centre ; il rallia les colonnes ébranlées,
et enleva le deuxième
étage des redoutes ennemies.
Vers la droite un officier supérieur
autrichien est fait prisonnier.
Le premier bataillon de Paris reçoit
vigoureusement un corps de cavalerie
venant soutenir la gauche de
l'ennemi, qui opéra sa retraite en grand désordre.
Les trois villages
indiqués sont Jemmapes, Cuesmes et Berthaimont.
Clairfayt occupait Jemmapes et Cuesmes, Beaulieu campait au-dessus de Berthaimont.
(Voir le Moniteur du 10 novembre 1792). »
■ Le
livre Louis-Philippe de Guy Antonetti, 1994 présente le duc de Chartres
comme étant le
personnage central de l'état-major qui suit Dumouriez :
« Des six hauts-reliefs qui le decorent (l'Arc de Triomphe),
deux sont à la gloire de Bonaparte
(Arcole et Aboukir), un à la gloire
de Marceau, un à la gloire de Kléber.
Des deux derniers, l'un (au nord
à l'ombre), côté avenue de Wagram,
est à la gloire de Napoléon
(Austerlitz), l'autre (au sud, au soleil),
côté avenue Kléber, à la
gloire de Dumouriez « et de son état-major » (Jemmapes) !
Et
naturellement, dans cet état-major, il y a le général Égalité au beau
milieu.
Jemmapes est le pendant d'Austerlitz, et Louis-Philippe (au
soleil) le pendant
de Napoléon (à l'ombre) ! Tout le complexe de
frustration dont souffre Louis-Philippe,
jaloux à jamais de ce petit
officier corse qui a eu l'outrecuidance
de lui prendre son rôle de
général vainqueur de la Révolution
se trouve là gravé dans la pierre
pour l'éternité :
son Jemmapes est égalé à l'Austerlitz de l'Autre !
Oui, il est le vrai soleil de la nation, l'Autre n'est que son ombre. »
(Guy Antonetti : Louis-Philippe, Fayard, 1994, page 761)
■ Le
guide historique L'Arc de Triomphe de Marc Gaillard, Amiens, 1998,
présente
le duc de Chartres comme étant le personnage debout de dos,
derrière Drouet blessé et qui agite son chapeau :
«
Dans ce haut-relief, Dumouriez, à cheval, se dirige de la gauche vers la
droite,
suivi de ses aides de camps, Bloissières, Ferrand, Rosières,
Stennabosse.
Le général Drouet, la jambe cassée, est tombé de sa
monture.
Le duc de Chartres, debout, agite son chapeau en signe de
ralliement.
Les fantassins, baïonnettes aux fusils, précèdent
Dumouriez.
A droite, un groupe fait feu sur la cavalerie autrichienne
qui arrive.
En avant de la niche, un officier autrichien prisonnier,
tête nue, le
bras en écharpe, semble méditer sur son mauvais sort. »
■ Le
livre L'Arc de Triomphe d'Anne Muratori-Philip, Paris, 2007, reprend la
version
de la notice historique de 1838, en situant le duc de Chartres
comme faisant partie des généraux qui suivent Dumouriez, sans préciser
lequel :
«
Au centre du bas-relief de Marochetti, Dumouriez, à cheval,
brandit son
chapeau en signe de ralliement ;
il est suivi de ses maréchaux de camp
Rosières, Ferrand, Stennebosse,
le duc de Chartres et Bloisières.
Derrière eux, Drouet blessé,
est secouru par un officier de santé alors
que Thouvenot,
de dos, sabre et chapeau levés vers le ciel, entraîne
ses hommes au combat.
À droite au premier plan de la bataille, un
officier autrichien, le bras en écharpe,
est fait prisonnier. Sur la
jante d'une roue brisée d'un caisson,
l'artiste a signé C. MAROCHETTI,
1834. »
Commentaires
■ En dehors de Dumouriez et du maréchal de camp Drouet, les acteurs
côté français sont les suivants :
- Ferrand Jean Henri Bécays dit Ferrand
(Lacaussade 16-9-1736 - Clichy-la-Garenne 28-11-1805),
maréchal de camp
provisoire à Jemmapes. Il commande l'aile gauche de l'armée
et c'est
lui qui dirige la première attaque qui conduit au repli des
Autrichiens.
- de Rosières Charles Joseph de Nozières d'Envezin
(Nancy 11-7-1739 - Paris 8-6-1808) maréchal de camp. Il sert à l'aile gauche.
- de Blottefière (et non Bloisières ou Bloissières) Pierre Louis
(Saint-Quentin 16-11-1746 - Compiège 22-4-1819) maréchal de camp
provisoire.
Il sert à l'aile gauche sous Ferrand.
- Stettenhoffen (et non Sténebosse ou Stennabosse ou Stennebosse)
Maximilien Ferdinand
Thomas (Vienne (Autriche) 19-12-1739 - Paris 16-6-1809)
maréchal de camp
provisoire. Il sert au centre sous le duc de Chartres.
- Pinet de Borde-Desforêts Jean Daniel
(Bergerac 10-4-1742 -
Clemont-Ferrand 8-8-1801) maréchal de camp.
Il sert au centre sous le
duc de Chartres.
- de Beurnonville Pierre Riel
(Champignol-lez-Mondeville 10-5-1752 -
Paris 23-4-1821) lieutenant général.
Il commande l'aile droite. (nom
inscrit en colonne 03).
- de Dampierre Auguste Marie Picot
(Paris 19-8-1756 - Valenciennes
9-5-1793) maréchal de camp.
Il sert à l'aile droite sous Beurnonville
et s'illustre à Jemmapes. (nom inscrit en colonne 03)
- Thouvenot Jacques
(Toul 20-1-1753 - Temesvár (Hongrie) devenu Timișoara (Roumanie) 31-3-1810)
adjudant général
colonel
surnuméraire.
Envoyé par Dumouriez pour conduire l'attaque de la
division de gauche,
il passera dans les rangs autrichiens le 5 avril
1793,
comme Dumouriez et le duc de Chartres, et sera Generalmajor le 14 mars 1804.
- de Harville Louis Auguste Juvénal des Ursins
(Paris 23-4-1749 -
Lizy-sur-Ourcq 8-5-1815) lieutenant général.
Il commande l'armée de
réserve mais ne prend pas directement part
au combat de Jemmapes. (nom
inscrit en colonne 05)
- de Nordman Joseph Armand (Molsheim 15-9-1754 - Wagram 6-7-1809),
colonel du 1er régiment de hussards qui
s'illustre sous les ordres directs de Dumouriez
en enlevant une redoute
autrichienne et en prenant 9 canons.
Il passera dans les rangs
autrichiens le 5 avril 1793, comme Dumouriez
et le duc de Chartres, et sera tué à Wagram comme Feldmarschall-Leutnant.
- Renard Jean-Baptiste, simple soldat, valet de chambre de Dumouriez,
«
voyant la confusion se mettre dans les rangs de l'armée française,
se
porte au milieu du désordre, harangue les soldats, parvient à rallier
l'infanterie,
fait avancer sept escadrons et rétablit le combat. »
(Dictionnaire des Braves de Napoléon (adaptation de : Les Fastes de la
Gloire)
de Michel Molières et de Natalia Griffon de Pleineville page
852, Le Livre Chez Vous, 2004)
■ Compte-tenu
de la liste des acteurs français et des interprétations précédentes,
les personnages représentés sur la frise seraient les suivants :
- le personnage debout, de dos, brandissant son sabre et son chapeau
serait
l'adjudant-général Jacques Thouvenot, frère du général Pierre
Thouvenot
dont le nom est inscrit sur l'Arc de Triomphe (colonne 30).
- le hussard à l'arrière de l'état-major de Dumouriez pourrait être le
colonel de Nordman,
commandant le 1er Hussards (ou Blottefière ?).
- le maréchal de camp moustachu, à cheval, tenant son sabre
horizontalement,
pourrait être un des maréchaux de camp précédents.
(Rosières ? ou un général connu pour être moustachu, Dampierre ?)
- le cavalier à cheveux bouclés, regardant de trois-quart vers la droite,
serait le duc de Chartres.
- le personnage de profil, à droite du cavalier à cheveux bouclés,
pourrait être un des généraux précédents. (Stetenhoffen ?)
- le personnage regardant de trois-quart à droite et dont la tête est
très proche
de celle de Dumouriez, serait un des généraux précédents.
(Ferrand ?)
Conclusion
Le
duc de Chartres figure très probablement au centre de l'état-major de
Dumouriez, assis sur le cheval
dont la tête touche presque le dos de
Dumouriez.
L'interprétation de Guy Antonetti est celle qui répond le
mieux
et le plus précisemment aux différentes possibilités.
De plus, la
tête de ce lieutenant général aux cheveux bouclés, ressemble à celle du
duc de Chartres
qui est sculpté aussi sur la frise
de
137 m autour de l'Arc de Triomphe,
dans ce même uniforme de lieutenant
général, à côté de Desaix.

Service Historique de la Défense (Château de Vincennes) : Dossiers BLOTTEFIERE (8Yd75) - CHARTRES (3Yd1321) - DROUET François Richer (20Yd34) - FERRAND Jean Henri BÉCAYS (7Yd37) - de NORDMAN (2Ye carton n° 3057) - PINET de BORDE-DESFORÊTS (4Yd3932) - ROSIERES (7Yd12) - STETTENHOFFEN (7Yd153) - THOUVENOT Jacques (8Yd20)
G. ANTONETTI : Louis-Philippe, Fayard, 1994
Duc de CASTRIES : Monsieur Thiers, Paris, Librairie Académique Perrin, 1983
G. ERMISSE : Marescot le Vauban de Napoléon, Paris, Éditions de Taillac, 2023
M. GAILLARD : L'Arc de Triomphe - Guide historique, Amiens, Martrelle Éditions, 1998
L. KUDRNA, D. SMITH : Biographical Dictionnary of all Austrian Generals during the French Revolutionary and Napoleonic Wars - 1792-1815,
http://www.napoleon-series.org
LOUIS-PHILIPPE : Journal de mon voyage d'Amérique, Flammarion, 1976
M. MOLIÈRES, N. GRIFFON DE PLEINEVILLE : Dictionnaire des Braves de Napoléon, Paris, Le Livre chez Vous, 2004
A. MURATORI-PHILIP : L'Arc de Triomphe - Regards..., Paris, Éditions du patrimoine - Centre des monuments nationaux
M. PRICE : Louis-Philippe - Le Prince et le Roi - La France entre deux révolutions, Paris, Éditions de Fallois, 2009
V. ROLIN : Les Hussards 1792-1815, Éditions SOTECA - Napoléon Ier - Collection Grande Armée - sous la direction de Jacques Garnier, 2009
G. SIX : Dictionnaire biographique des Généraux et Amiraux de la Révolution et de l'Empire (1792-1814), Paris, Librairie Historique et Nobiliaire
Georges Saffroy, Editeur, 4 rue Clément, 4 (VIe), 1934
J. THIERRY, G. COULON : Notice historique de l'Arc de Triomphe de l'Etoile, Paris, J. Thierry rue Sainte-Appoline, 13 ; Rosselin marchand d'Estampes
quai Voltaire, 21 ; à l'Arc de Triomphe, chez le gardien, 1838
D. THOUVENOT : L'oublié de la
gloire... De la guerre d'indépendance des États-Unis au blocus de
Bayonne - L'incroyable épopée de Pierre Thouvenot,
Général lorrain, Baron de l'Empire, Edhisto, 2011