Le symbolisme de la Salamandre

 

Couverture du catalogue de 1938-1939 avec le modèle de Salamandre Capitale et signée « d'après J.L. BRONNET »

 

La perception de la Salamandre comme poêle mobile à combustion lente a été très vite faite par le public. Le nom déposé en 1889 par Edmond CHABOCHE a été un succès qui a dépassé le cadre de l'entreprise CHABOCHE. Le nom a été largement utilisé par les concurrents et par le public pour des poêles de différentes marques. Cela a pu se faire car la Salamandre est un emblème ayant tout un imaginaire symbolique concernant le feu et sa maîtrise.

 Voici ce qu'écrit Chantal CHABOCHE au sujet de la Salamandre :

«  Batracien fabuleux, les Anciens la croient apte à vivre dans le feu sans y être consumée, voire à renaître de ses cendres. Pour ARISTOTE, elle a même le pouvoir d'éteindre le feu, croyance qui se répand par le
« Physiologue » et dans toute l'Europe chrétienne. On la retrouve à l'époque médiévale : Et sachiez que la salamandre vit enmi la flamme dou feu, sonz dolor et sanz domage de son corps, neis ele estaint le feu par sa nature. (Brunetto LATINI, Li livres dou Tresor, poète, historien et théologien florentin du Moyen Âge, 1230-1294). MARCO POLO, voyageur vénitien (1254-1324) raconte qu'il existe un lieu (sans doute du côté de l'Altaï, massif de l'Asie centrale russe, chinoise et mongole) où l'on extrait un minerai incombustible « dont on fait la salamandre ». (Rudolf WITTKOWER,  L' Orient fabuleux, Paris, Éd. Thames & Hudson, 1991)

FRANÇOIS Ier  (1515-1547) met dans ses armoiries une salamandre au milieu du feu : on peut voir son emblème aux châteaux d'Amboise, de Blois (aile François Ier), Chambord, Chenonceau et Fontainebleau (galerie François Ier) ; au château de Chambord, la salamandre figure sur deux cents caissons (sur 400) du plafond des quatre salles en croix du second étage ; le château de Chenonceau comporte une salle François Ier  et un salon où sont sculptées sur la cheminée « la Salamandre » et « l'Hermine », emblèmes de FRANÇOIS Ier  et de son épouse CLAUDE DE FRANCE. La devise du souverain, Nutrisco et extinguo, peut se traduire par « Je nourris (le bon feu) et j'éteins (le mauvais) ».

Se cachant dans les flammes, l'animal est aussi le symbole de la pudeur, de la chasteté et de la virginité de Marie. Dans les allégories chrétiennes, il représente l'homme vertueux qui ne se laisse pas consumer par le feu de la cupidité et de la luxure. Incombustible, il symbolise encore l'éternité.

Pour les alchimistes, la salamandre est « le symbole de la pierre fixée au rouge (…) ils ont donné son nom à leur soufre incombustible. La salamandre qui se nourrit du feu et le phénix qui renaît de ses cendres sont les deux symboles les plus communs de ce soufre. » (TERS) »

 

 

La Salamandre est une espèce de triton qui était supposé par les Anciens capable de vivre dans le feu sans y être consumé. Il fut identifié au feu, dont il était une manifestation vivante. À l'inverse, on lui attribuait le pouvoir d'éteindre le feu, par son exceptionnelle froideur. Chez les Égyptiens, la salamandre était un hiéroglyphe de l'homme mort de froid... Dans l'iconographie médiévale, elle représente le Juste qui ne perd point la paix de son âme et la confiance en Dieu au milieu des tribulations. (J. CHEVALIER et A. GHEERBRANT Dictionnaire des Symboles, Paris, Robert Laffont/Jupiter, 1982)

En 1517, François Ier visite Rouen. Au pont de Robec la ville avait dressé un théâtre, dont la scène était emplie par « ung monde ». Au passage du cortège, deux géants figurant Atlas et Hercule « ouvrent le ciel » en tirant le rideau. On voit alors, devant une image de ville, une salamandre, attaquée par un ours et un taureau. « Mais touteffoys finalement, la victoire demouroit à la salamandre. » Afin que le sens fût clair, la devise annonçait :

                                                                                « La Salamandre, en vertu singulière,

                                                                                 Lors estreignoit l'horrible feu de Mars

                                                                                 Quand du grand ours emporta la banière

                                                                                  Et du thoreau rompit cornes et dardz »

Ours et taureau symbolisaient les cantons de Berne et d'Uri représentant les Suisses battus à Marignan en 1515. (J. JACQUART François Ier, Paris, Fayard, 1981)

 

Ce symbolisme continue à se poursuivre au cours des siècles. Dans le film Fahrenheit 451 de François TRUFFAUT de 1966 avec Oskar WERNER et Julie CHRISTIE, les pompiers de l'avenir ont pour mission de brûler tous les livres. Leur emblèmes est bien sûr la Salamandre.

 

Image de la couverture du livre de Morris WEST (1973) : La Salamandre

 À  l'heure actuelle, un symbole dérivé de la résistance au feu est repris dans le livre d'Axel KAHN et de Fabrice PAPILLON Le secret de la Salamandre, Paris, Éditions Nil, 2005 avec le commentaire suivant des auteurs : La salamandre est symbole d'immortalité. Cet animal est gâté par la nature : son corps peut s'auto - générer. Saurons-nous un jour percer son secret ? Le livre développe les thèses du clonage et de l'homme inépuisable source de cellules régénératrices.

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