LES OUBLIS
SUR l'ARC DE TRIOMPHE
■ 1. Les oublis de 1836
Saint-Cyr NUGUES établit le 6 février 1836, une liste de 384 noms à inscrire sur l'Arc de Triomphe.
Adolphe Thiers ayant reçu cette lettre qu'il avait demandée un mois avant, examine attentivement cette liste,
probablement avec le roi Louis-Philippe, et effectue quelques corrections,
en oubliant huit noms dont deux seront repris en 1841:
- Jean Baptiste Annibal AUBERT-DUBAYET (1757-1797), général de division, ministre de la Guerre
- Charles Marie Robert comte d'ESCORCHES de SAINTE-CROIX (1782-1810), général de brigade, mort au combat
- Jacques Marguerite PILOTTE, baron de LA BAROLLIÈRE (1746-1827), général de division
- Anne François Augustin, comte de LA BOURDONNAYE (1745-1793), lieutenant général
- Antoine Nicolas COLLIER, comte de LA MARLIÈRE (1745-1793), général de division
- LA MARTILLIÈRE, inscrit en 1841
- LA MARTINIÈRE, inscrit en 1841
- François Louis MAGALLON, comte de LA MORLIÈRE (1754-1825), général de division
Ils sont remplacés par CHAZOT, DUBOUQUET, DUVAL, HARVILLE, LANOUE, MUSNIER, LALLEMAND et SPARRE
■ 2. Les oublis de 1841-1842
La commission de l'Arc de Triomphe, présidée par OUDINOT, en inscrivant les 244 noms de 1841,
oublient six noms qui avaient été retenus durant les débats, pour des questions de places insuffisantes :
- Jean Pierre BOUCRET (1764-1820), général de division
- Jean Christophe COLIN dit VERDIÈRE (1754-1806), général de division
- Vincent Marcel de CONCHY (1768-1823), lieutenant général
- Nicolas Ernault DESBRULYS (1757-1809), général de division
- Pierre DEVAUX (1762-1819), baron, général de brigade
- Claude François DUPRÈS (1755-1808), baron, général de brigade, mort au combat
■ 3. Les oublis de 1842
La commission finit son travail en 1842, en inscrivant 24 nouveaux noms,
ce qui fait que tous les généraux tués à Wagram et à Borodino - la Moskowa sont inscrits sur l'Arc de Triomphe,
sans compter 84 à 86 des réclamations satisfaites. mais dans ce bilan deux généraux sont oubliés,
ceux qui ont été tués à Borodino - la Moskowa, dans une armée sœur de l'armée française.
Seul le nom de François Auguste DAMAS de l'armée de Westphalie est inscrit. Sont oubliés :
► Karl Ludwig Friedrich von BREUNING (1771-1812), général de cavalerie du Wurtemberg.
Karl Ludwig Friedrich Von Breuning est né en 1771. Il est colonel en 1809, au 4e régiment de chasseurs du roi de Wurtemberg.
Il est fait chevalier de la Légion d'honneur le 14 octobre 1809.
Général de brigade en 1812, il fait partie du 3e Corps de la Grande Armée, dirigé par Ney.
(1er et 2e Chevau-Légers sous les ordres du général Frédéric Auguste de
Beurmann). Il s'illustre le 8 août 1812 à la bataille d'Inkowo,
dans la bataille du marais de Molevy, où sa brigade sauve la divison du
général Sébastiani et contraint à la retraite les cosaques de Platov.
D'après le rapport de Von Breuning : « Une vive canonnade se fit
entendre sur notre flanc gauche. Le bruit qui approchait rapidement
nous faisait supposer, non sans raison, que la division de cavalerie du
général Sébastiani, stationnée sur la route entre Rudnya et Inkovo,
était sévèrement attaquée par l'ennemi...sous le feu de six canons et
(malmenée) par un essaim de six à sept mille hussards et cosaques,
suivi d'une forte colonne d'infanterie. Nous sommes immédiatement intervenus et avons couvert la retraite, en arrêtant
de nombreuses attaques ennemies sous le commandement du capitaine Breithaupt et en détruisant les canons ennemis. »
Le 14 août 1812, von Breuning participe à des attaques de cavalerie près de Krasnoïe
contre les troupes du général Dimitri Petrovich Neverovski (1771-1813).
Le 7 septembre 1812, à Borodino, dans le 3e Corps de Ney, il est dans la 25e division wurtembergeoise
sous les ordres de Marchand et est sévèrement blessé lors de l'attaque des retranchements de Semionov ;
il meurt le 30 octobre 1812, près de Mojaïsk, à l'age de 41 ans.
La famille Von Breuning liée à Beethoven (information de Jochem Rudersdorf)
Le nom du compositeur de Bonn, mondialement connu, Ludwig van Beethoven (1770-1827) est étroitement lié
à celui de la grande famille von Breuning. Helene Genoveva von Breuning (1750-1838), née von Kerich,
veuve d'Emmanuel Joseph von Breuning (1741-1771), originaire de Bad Mergentheim et conseiller à la cour
du prince électeur de Cologne à Bonn, a accueilli le jeune Beethoven dans sa famille, a veillé à son éducation et
l'a introduit dans la société. Sa fille Eleonore von Breuning, à qui il enseigna le piano, fut le premier grand amour
de Beethoven, et son fils Stephan von Breuning son ami de longue date.
► Eugen August Hellmuth von LEPEL (1773-1812), général de brigade des cuirassiers de l'armée de Westphalie.
Blessé mortellement à Borodino le 7 septembre 1812, il décède le 12 septembre 1812 à Mojaïsk
après avoir subi l'amputation du bras gauche.
Eugen August Hellmuth von Lepel est né le 7 mars 1773 à Ludwigsburg, à 17 Km au nord de Stuttgart.
Fils de Joachim Otto Friedrich von Lepel (1740-1802), sergent-chef,
garde du corps du prince d'Isenbourg-Büdingen,
Wolfgang Ernest II, et de Caroline née Röder (1749-1802).
Baron von Lepel, il sert comme officier prussien de 1791 à 1800,
puis dans l'armée du
Wurtemberg où il devient colonel. Fin 1807, il sert Jérôme Bonaparte,
roi de Westphalie. Il est premier écuyer en janvier 1808, comte le 10 janvier 1810,
aide de camp du roi Jérôme le 9 juin 1810 puis général de brigade le 24 novembre 1811.
Il sert en Russie dans le 4e Corps de cavalerie de Latour-Maubourg.
Sa brigade est composée des régiments du 1er et du 2e Cuirassiers westphaliens et d'une batterie à cheval.
Considéré comme le plus bel officier de l'armée de Westphalie, favori de la reine Catherine de Wurtemberg,
il est blessé mortellement au cours d'une charge à Borodino et reçoit la Légion d'honneur à titre posthume.
Composée d'environ 800 cavaliers lourds, les régiments des 1er et 2e Cuirassiers eurent
5 morts et 22 blessés à Borodino.
Dans son livre L'Arc de Triomphe et les oubliés de la gloire, Paris, J. Peyronnet et Cie éditeurs, 1969,
Georges RIVOLLET mentionne dans les oubliés, 113 généraux de division ou lieutenants généraux (fichier 1 .pdf à consulter),
399 généraux de brigade ou maréchaux de camp (fichier 2 .pdf à consulter), 10 vice-amiraux et contre-amiraux (fichier 3 .pdf à consulter) et
les deux maréchaux de France ci-dessous :
- Jean Baptiste Donatien de VIMEUR comte de ROCHAMBEAU (1725-1807)
- Louis Auguste Victor de GHAISNE comte de BOURMONT (1773-1846)
■ 6. Jean TULARD et les oublis en 2017
Dans la préface de Les noms gravés sur l'Arc de Triomphe, Paris, S.P.M., 2017,
Jean TULARD mentionne les oubliés qui suivent :
■ 7. Commentaires sur les oublis et conclusion
Georges SIX dans son Dictionnaire biographique des généraux et amiraux français de la Révolution et de l'Empire,
recense 2232 noms. Sur l'Arc de Triomphe, il n'y a que 660 noms (661 si l'on compte les deux généraux BEURMANN,
inscrits à la même place). Chacun peut considérer qu'il y a eu des oublis, mais selon l'époque, et surtout selon la personne,
le choix des oubliés diffèrent.
■ Réponses aux propositions de Georges RIVOLLET et Jean TULARD
1 - Le maréchal
ROCHAMBEAU s'est illustré dans l'aide française à l'armée américaine
mais n'a plus eu aucun commandement après le 20 mai 1792.
Le premier nom de général tué au combat inscrit sur l'Arc de Triomphe
est le général GOUVION, mort le 11 juin 1792. On peut donc considérer
que le maréchal ROCHAMBEAU, malgré ses mérites, se situe à une période trop ancienne
et surtout pas encore concernée par la France républicaine et la France de l'Empire.
2 - Le maréchal
de BOURMONT qui n'était encore que général de division en 1815, est passé à
l'ennemi
avec son état-major le 15 juin 1815, soit trois jours avant Waterloo.
La commission de l'Arc de Triomphe présidée par le maréchal OUDINOT et rendant des comptes
au maréchal SOULT en 1840 n'a même pas étudié le cas du « traitre » BOURMONT.
De plus BOURMONT refusa de prêter serment à Louis-Philippe
puis fut condamné à mort par contumace pour avoir soutenu la duchesse de Berry en Vendée en 1832.
Le cas BOURMONT était incompatible avec les choix de 1836 et même de 1840-1842,
malgré le fait que BOURMONT ait été amnistié en 1840.
Bibliographie
F. G. HOURTOULLE : BORODINO - LA MOSKOWA - La bataille des redoutes, Paris, Histoire & Collections, 2000
M. MOLIÈRES, N. GRIFFON de PLEINEVILLE : Dictionnaire des Braves de Napoléon, Paris, Le Livre chez vous, 2004
A. PIGEARD : Dictionnaire des batailles de Napoléon, Paris, Tallandier, 2004
G. RIVOLLET : L'Arc de Triomphe et les oubliés de la gloire, Paris, J. Peyronnet et Cie, 1969
G. SIX : Dictionnaire
biographique des généraux et amiraux français de la Révolution et de
l'Empire, Paris, Georges Saffroy, 1934
J. TULARD : Napoléon et la noblesse d'Empire, Paris, Tallandier, 2001
Service Historique
de la Défense (Château de Vincennes) :
dossier XEM 267 Inscriptions sur l'Arc de Triomphe de l'Étoile,
travaux de la commision chargée d'examiner les réclamations
décembre 2024